1551, 4 mai — Paris

France, Paris, AN Minutier Central, 100/43

Statut :
Transcription :

[Analyse enrichie] Honorable femme, Jeanne Ouvrard, veuve d’Augustin Cardon, en son vivant marchand drapier, bourgeois de Paris , tant en son nom que comme tutrice et curatrice de ses enfants mineurs, baille à titre de loyer pour trois ans à compter de la saint Rémi prochaine, à Nicolas Frissart, marchand drapier, bourgeois de Paris , présent, une maison et ses appartenances sises à Paris , rue de La Vieille Barrillerye, où pend pour enseigne Le Dromadaire, maison qui lui appartient auxdits noms, ainsi que les ustensiles du métier de chaussetier qui sont dans l’ouvroir ; bail consenti à la réserve de la troisième chambre et du grenier qui est au-dessus et la possibilité « de l’aller et venir par lad. baillaresse ou ses locatifz » qui occuperont lesd. chambre et grenier, par l’ouvroir de lad. maison ; bail fait moyennant la somme de 92 l.t. par an. que led. Frissart s’engage à verser à la bailleresse aux quatre termes habituels à Paris , le premier à Noël prochain. Le preneur s’engage également, pour la sûreté du loyer, à garnir de meubles exploitables les choses louées et à les entretenir de menues réparations, et la bailleresse le tiendra clos et couvert aux us et coutumes de Paris . Le preneur ne pourra transporter son bail à un tiers sans le consentement de lad. Ouvrard.
Contrat passé en la présence et avec le consentement d’honorable homme Alexandre Sergent, marchand drapier-chaussetier, bourgeois de Paris , qui a renoncé au profit dud. Nicolas Frissart, au temps qui lui reste à occuper lesd. choses baillées selon la teneur des baux sur ce faits, tant par led. feu Cardon que par sa veuve ; cependant il a été accordé entre eux que led. Sergent paiera à celle-ci les loyers qui viendront à échéance à la saint Jean-Baptiste et à la saint Rémi prochaines. Lad. veuve renonce aux bénéfices de Velléien et autres.
Voir autre document du même jour, chez le même notaire entre Alexandre Sergent et Nicolas Frissart.

N O T E La rue de La Barillerie, tire son nom du substantif baril.
Avant que les flacons contenant les boissons fissent, au XVIIIe siècle, leur appartition sur la table des repas, les serviteurs allaient, chez les riches, remplir les verres ou les coupes à un récipient, le baril (étym. incertaine) posé sur le dressoir ; la partie supérieure de ce récipient était formée d’un couvercle muni d’une serrure. Les barils étaient souvent d’une richesse extrême, construits en bois précieux (cœur de chêne, poirier, alisier, érable, tamaris, brésil), couverts d’ornements de cuivre, d’argent ou de vermeil. On leur confiait non seulement les vins fins, mais aussi des liqueurs, des eaux de senteur, des sauces, l’huile, et même la moutare, ce qui indique qu’il en existait de toutes tailles. Au XIIIe s. la corporation des fabricants de barils jouissait de tous les privilèges attachés aux industries de luxe. Le mot désignait aussi une mesure de capacité.
En dérivent les substantifs suivants : barillers, barilleurs : artisans qui fabriquaient ces récipients ; et barillerie, l’atelier où ils exerçaient leur métier. (D’après : Alfred FRANKLIN, Dictionnaire historique des arts, métiers et professions, Paris-Leipzig, 1905-1906, p. 68.)
L’existence de la rue de La Barillerie est attestée par les censiers et les rôles de la taille établis à la fin du XIIIe siècle (Archives nationales KK 283). Cf. Adrien FRIEDMANN Paris, ses rues , ses paroisses du Moyen Âge à la Révolution – Origine et évolution des circonscriptions paroissiales, Paris, Plon, 1959. Voir en particulier, p. 374-384, l’Annexe A.III : Topographie des paroisses de Paris d’après le rôles de la taille (fin du XIIIe siècle), ce qui concerne l’emprise des paroisses Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-des-Arcis ; p. 337-340 (Description de la censive de Saint-Éloi dans la Cité, d’après l’itinéraire suivi par le receveur du Prieuré en 1280 (Rubriques extraites du censier de 1280 : AN : LL 75, f. 13v°-19)
Ainsi dans le censier de 1300 (AN : LL 75, f. 50-51), le cheminement est-il décrit : « Incipere debemus ad Barillariam ad domum immediate contiguam porte nostre ante portam regis a parte sinistra sicut exitur de dicta porta », que l’abbé Friedmann (p. 337, note 5) commente : « le censier repart, avant de parcourir, à main gauche [i. e. en se tenant face à l’entrée du Palais], la chaussée de La Barillerie et la rue de La Calandre, jusqu’au coin de La Savaterie. »
Jusqu’au XIVe siècle, la rue de La Barillerie s’ouvrait sur la place Saint-Michel que firent disparaître les travaux d’agrandissement du Palais par Philippe le Bel en 1313 (Friedmann, op. cit. p. 374, note 2) et l’inclusion de la chapelle Saint-Michel dans l’enceinte du palais ; le premier pont Saint-Michel n’a été construit qu’en 1378 ; voir Jacques HILLAIRET, Évocation du Vieux Paris. Vieux quartiers, vieilles rues, vieilles demeures, Nouv. éd., Paris, Les Éditions de Minuit, 1960, p. 444-445.
Dans le Plan de Tapisserie, la « rue de La Barillerie » est nommée de manière très approximative : « rue la Batiller » (voir : Alfred FRANLIN, Étude historique et topographique sur le plan de Paris de 1540, dit « Plan de Tapisserie « , Paris, Aubry, 1869, p. 50, après avoir signalé que, sous la forme latine Barilleria, elle est attestée dès 1280 et, en 1292, sous la forme française Barillerie, bien qu’à cette date un seul bariller y exerçât, et relevé le nom de « rue de La Barillerie » dans un compte du domaine de 1489 (Henri SAUVAL, Histoire et recherche des antiquités de la ville de Paris, Paris, 1724, 3 vol., t. III, Preuves, p. 487), ajoute : « la rue non nommée [sur le Plan de Tapisserie] qui la précède [au nord] était la rue Saint-Barthélemy ; toutes deux viennent d’être comprises dans le parcours du boulevard du Palais. » Elle occupait en effet l’actuelle rive occidentale de cette voie hausmannienne ouverte en 1858. Cf. Paris aux cent villages : l’Île de la Cité, Le Palais des Rois et de la Justice, Paris, 1975, p. 113-123, avec la reproduction partielle du plan de l’abbé Delagrive (1754) ; Hillairet, op. cit. , p. 444.
À quelques exception près (le « Plan de Truchet et Hoyau » par ex.), la rue de la Barillerie apparaît sur les autres plans analysés par le même historien (A. FRANKLIN, Les anciens plans de Paris. Notices historiques et topographiques, Paris, Léon Willem, 1878-1880, 2 vol.).
– plan dit « de Ducerceau » (1550-1560)
– plan de Gomboust (1647)
– « rue de la Balrillerie », plan de N. Berey (1654)
– plan de Jouvin et Rochefort (1690)
– plan de Bullet et Blondel (1676-1710)
– plan de Jean de La Caille (1714) « Il y a le long de cette rue, adossées contre les murs du Palais, 50 ou 55 échoppes ou petites boutiques . »(Nomenclature).
Au XIXe siècle, le Petit Atlas pittoresque des quarante-huit quartiers de la ville de Patis (1834) de Aristide-Michel ÒM. PERROT (Reproduit en fac-similé en en vraie grandeur avec une nouvelle introduction, des notes, des additions et des corrections par Michel Fleury et Jeanne Pronteau, Paris, Service des travaux historiques de la ville de Paris, 1987), la fait figurer sur les plans des IXe arrondissement (35e quartier) et XIe arrondissement (44e quartier) ; on notera qu’à cette date la rue Saint-Barthélemy a disparu et que la rue de La Barillerie désigne l’ensemble de la voie qui traverse l’île de La Cité du pont au Change au Pont Saint-Michel.
L’épithète « Vieille » qui qualifie dans ce document la rue de La Barillerie, est vraisemblablement dû à une contamination de la rue de La Vielle-Draperie dont le départ, vers l’est et le cœur de La Cité , en marquait le commencement au nord, comme il marquait, au sud, le terme de la rue Saint-Barthélemy déjà citée.



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