La transcription a été établie à partir de la copie mise en forme conservée dans la même liasse ; quelques variantes orthographiques ont été signalées entre parenthèses.
[Analyse enrichie] Frère Denis Piet, religieux profès et aumônier en l’abbaye de Morigny-lès-Étampes, comme procureur et receveur des religieux de lad. abbaye, au nom desd. religieux, s’est transporté, en compagnie des notaires soussignés, au logis de monseigneur maître Jean Hurault, conseiller du roi en sa cour de Parlement et abbé de lad. abbaye de Morigny, étant en l’enclos du Palais. C’est là que, parlant à la personne dud. abbé, Denis Piet lui a humblement remontré que, par arrêt de la cour en date du 19 décembre 1583, donné entre eux, il avait été ordonné que certaine transaction ci-devant faite avec Macé Guezenel, fermier du revenu de lad. abbaye, « seroit entrentenue et que, en ce faisant, leur seroit par led. abbé, suivant icelle, delivré leurs necessitez, affin que lesd. religieulx peussent vivre en commung , administrer et faire le divin service tel qu’il a esté ordonné par les predecesseurs fondateurs de lad. abbaye ; et a cest effect ilz auroient nommé led. Piet pour estre par led. sieur abbé ou ses fermiers mis en ses mains les deniers que icelluy seiur abbé leur doibt distribuer par chacun an affin qu’il ne faille poinct que deux comptes soient renduz pour ung. Toutesfois led. sieur abbé, lequel differe a son possible de leur fournir leurs necessitez, leur faict faire chacun jour des sommations sans propos, apparence ny occasion aulcunes, esperant par la de faire apparoir a la court qu’il s’est mis en son debvoir de satisfaire a quoy il est tenu, et au contraire pour cuyder monstrer que lesd. religieulx sont contrevenans ou desobeissans a l’arrest ; car, combien qu’ils vivent en commung selon leur ordre, couchent en dortoir, administrent le divin service et fassent leur debvoir en tout et partout, ce neantmoings icelluy sieur abbé les faict sommer de ce faire chacun jour, qui est les travailler en vain et, parce que lesd. pauvres religieulx sont incommodez, soit pour faire le divin service, soit en leur entretenement, d’aultant que l’eglise ou le divin service s’administre est ruynee descouverte, de sorte que par les pluyes, ventz, neiges et autres injures de l’air, ilz sont souvent contrainctz de se retirer et d’abandonner le divin service ; et si d’ailleurs ilz ne sont nombre compectant de religieulx pour faire le divin service ordonné par leurs predecesseurs, ayant quatre novices et ung precepteur qui y estoient esté expulsez et chassez ; pour et a l’occasion de quoy ilz auroient presenté leur requeste a la court le 5e de ce present mois et supplié icelle qu’il luy pleust ordonner que led. sieur abbé seroit tenu de recepvoir en lad. abbaye quatre novices et un precepteur, leur fournir livres necessaires en leurd. eglise, qu’il ayt a faire reparer icelle eglise et autres bastimens qui menassent une ruyne entiere si de brief il n’y est pourveu, expulser et mectre hors la maison abacialle les gens marchans avec leur famille qui y sont de present, rapporter soixante-six marcz d’argent proceddans des relicques d’icelle, ensemble le cuyvre et autres choses destinez pour le service et decoration de lad. eglise, rapporter tous les tiltres de lad. abbaye pour estre mis selon qu’ilz estoient cy devant et autres choses mencionnez en lad. requeste. Et parce que lesd. religieux desirent de vivre en paix et sans proces, comme n’estant leur vaccacion, led. Piet, ou nom de tous lesd. religieulx et comme ayant charge d’eulx, a supplié et supplie, prie, somme et interpelle led. sieur abbé de satisfaire a ce que dessus et au contenu de lad. requeste affin qu’ilz ne soient contrainctz d’en poursuivre l’entherinement, et qu’il ayt a leur declairer s’il entend y satisfaire, affin que, y satisfaisant, il se desiste de lad. instance et de toutes autres qui sont et peuvent estre pendante en ladicte court, declarant, a faulte de ce faire, que par necessite, il le contrainct de plaider. »
[Signé] B. Piet, pour et au nom desd. religieulx, Bontemps, Cothereau
Dans la copie mise au net, Il n’y a pas de solution de continuité entre la requête de Denis Piet et la réponse de l’abbé Hurault
"Lequel sieur Hurault a faict responce que, pour le regard de l’arrest de la court, il a esté donné a sa poursuitte et pour tascher a faire reffrener a lad. court les vices enormes desd. religieulx et, de faict, lad. court y auroit pourveu sommairement ; suivant lequel arrest, led. sieur auroit tousjours fourny aux religieulx les deniers portez par la transaction, mesmes auroit avancé davant les termes de payemens et auroit nommé dedans la huictaine suivant led. arrest frere Pierre Daubiche pour manier et distribuer lesd. deniers, auquel il entend doresnavant bailler ses deniers et non a autres, comme il apperra par les quictances desd. religieulx passees en chappitre. Quand est de la restitution de l’argent et cuyvre que demandent lesd. religieulx, soubstient qu’il ne [dans la minute sçait] sçayt que c’est et que c’est une pure calompnie [dans la minute calompnye] contre luy et feu son pere, auquel, pour rescompense d’avoir [dans la minute recompense d’avoyr] saulvé l’eglise de lad. abbaye du feu, et lesd. religieulx de la viollence des guerres, lesquelz mesmes il auroit retiré en sa maison en ceste ville, [dans la minute, biffé ilz veulent après sa mort] ilz luy font après sa mort une accusation indigne du rang qu’il a tenu pendant sa vie. Et, pour ses causes led. sieur abbé se constitue demandeur en reparation d’injures et entend se pourveoir allencontre d’eulx [dans la minute, biffé tant] des larrecins par eulx, comme tenu des meubles par eulx desrobez au decedz de feu frere Jean Hurault, son grand oncle, abbé de lad. abbaye de Morigny, que de ceulx de feu frere Jacques Audren, frere Loys Pavye et maistre Lucas Beguin, lesd. meubles enlevez et pris par frere Guillaume Andry et frere Denis Piet [dans la minute Pyet] qui s’en trouveront mesmes encores saisis et, pour le regard des sommations que led. frere Denis Piet se plainct avoir esté plusieurs fois reiterez [dans la minute reiterees] reiterees en chappitre par led. sieur, soubstient led. sieur que c’est son debvoir de les admonester et qu’ilz ne se doibvent plaindre sy [dans la minute se] souvent il tache a les remectre en [dans la minute au] bon chemin, sommant par led. sieur led. Piet qu’il ayt, suyvant lesd. commandemens, a bailler [dans la minute, le verbe exact vuider] incontinant et sans delay des prisons des religieulx de lad. abbaye, lesquelles il a changees et accomodees en une chambre et allee, pour oster tous moyens aud. sieur de le pugnir. Et neantmoings, pour monstrer que led. sieur ne cherche [dans la minute cerche] que paix, il offre nommer de sa part deux de messieurs des conseillers de lad. court et que lesd. religieulx en conviennent de deux autres pour, par eulx estre jugé les differendz d’entre lesd. sieur et religieux, et ce a peyne de cinq cens escuz aux contrevenans, protestant, a faulte de ce faire, de se pourveoir ainsi que de raison. Dont et de laquelle sommation et choses susdites, lesd. parties ont requis et demandé lettres ausd. notaires qui leur ont octroyé et baillé ces presentes pour leur servir et valloir en leur gré et lieu ce que de raison."
Passé en la maison dud. sieur abbé, le mercredi 16 mai 1584.
[Signé] Hurault ; le frère Piet n’a pas signé.
Cottineau, Abbayes et prieuréss.n.