Marie Paon, veuve de Guillaume Rolland, en son vivant marchand papetier, bourgeois de Paris , baille à titre de loyer pour 4 ans et 9 mois, à compter de Noël prochain, à Claude Guymier, présentement serviteur de lad. veuve, «l’ouvrouer, la monstre joignant icelluy ouvrouer, la suppendue* estant en l’allee, une place pour mectre ung cheval en l’estable, la chambre a la leyne et le grenier de derriere lad. chambre a la leyne, une chambre au corps d’hostel de derriere et la moictié des caves et celliers en tel endroict que bon semblera a lad. dame bailleresse» et selon les séparations dont ils conviendront ensemble, à frais communs ; le tout fait partie d’une maison sise à Paris , rue des Lombards où pend pour enseigne Les Daulphins et où demeure à présent lad. dame qui baille en outre aud. preneur les ustensiles qui se trouvent dans les lieux qu’elle lui loue, à l’exception d’un grand coffre fermant à clef, dans lequel elle mets ses habits «et aultres besongnes de mesnaige» coffre qui se trouve dans la chambre du corps d’hôtel de derrière ; elle sera en outre tenue de fournir aud. Guymier du linge de table, un lit, de la vaisselle d’étain, des ustensiles de ménage «fors le linge comme chemises, couvrecherfz, mouchouers» que lad. bailleresse ne sera tenue de lui fournir, que, hors usure raisonnable, ni lui ni ses gens ne devront gâter ou détériorer, sous peine de devoir les faire refaire ; ce bail est conclu à la condition expresse que lad. dame pourra aller et venir à quelque heure que ce soit, de jour ou de nuit, à travers les espaces loués, s’asseoir dans l’ouvroir, comme elle l’a fait jusqu’à présent, «comme dame et maitresse», elle pourra parler et communiquer avec les marchands qui fréquenteront ledit hôtel, «combien que la marchandise ne apartient a lad. bailleresse», et qu’elle pourra communiquer de toutes ses affaires avec toutes les personnes avec lesquelles elle aura affaire ; elle pourra aussi «faire ouvrir la trappe qui est aud. ouvrouer pour avaller et tirer ses vins, fustailles, boys et autres provisions et aussi pourra faire taverne aud. ouvrouer quant bon luy semblera». Il est aussi expressément convenu que led. Guymier sera tenu de vaquer aux affaires de lad. veuve tant à Paris qu’aux champs, d’établir ses quittances et ses comptes tant à Paris qu’ailleurs et lad. dame bailleresse et led. preneur se serviront l’un comme l’autre des serviteurs l’un de l’autre quand ils seront aud. hôtel, sans diminution de loyer. Celui-ci se montera à trente écus d’or par an payables aux quatre termes de l’an accoutumés, premier terme à Pâques prochaines ; le présent bail est incessible, sans le consentement de la bailleresse ; (la suite du texte figure après la transcription des lignes biffées :)
[passage rayé à l’intérieur duquel apparaissent plusieurs éléments eux-mêmes cancellés : [biffé : «Et a esté ce present bail faict a la charge et condition expresse que, si le preneur est defaillant de payement quinze jours après chacun terme escheu ou d’acomplir les charges et conditions susdites quant bon semblera a ladicte bailleresse, ou que led. preneur ou la femme qu’il pourra espouser murmurassent ou feussent rebelles et rigoreulx, eulx, leurs gens et serviteurs tinsent quelque rigueur a ladicte bailleresse quant elle vouldroit aller esd. lieulx comme dame et maistresse aud. hostel, [marge, rayé pourveu qu’il n’y ayt de la faulte de lad. dame bailleresse et procedant de son faict] esd. cas, en chacun d’iceulx, ces presentes seront et demoureront nulles comme non advenues, et pourra lad. dame bailleresse mectre led. preneur, sa femme et famille [biffé mectre led. preneur hors desd. lieulx baillez [marge ; rayé a esté accordé que si led. preneur est defaillant de payement dud. louaige, quinze jours après chacun terme escheu ou d’acomplir les charges susdites, esd. cas et chacun d’iceulx, ces presentes seront et demeureront nulles et non advenues pour le temps qui restera lors a escheoir [biffé et pourra lad. bailleresse mectre led. preneur], le tout de son auctorité privee, sans sommation, figure de procès ny autre solemnitez de justice garder et neanmoins contraindre led. preneur a payer ce qu’il debveroit lors a cause du contenu en ces presentes (fin de la section biffée)»]
– et aussi à la charge et condition que led. preneur ne pourra, pendant led. temps, prendre ni faire prendre par d’autres ni par des moyens indirects lad. maison dont lad. dame est propriétaire et cela, sur peine de de nullité des présentes. Si cela advenait, le preneur sera tenu de loger lad. bailleresse sans en payer aucune autre chose, dans les lieux qu’elle s’est réservés pendant la durée du présent bail [marge «synon que le pris de 20 escuz soleil»]
aux mêmes conditions que dessus, et sans qu’il puisse mettre lad. bailleresse hors des lieux, que lui-même ou un autre pour lui les prenne, directement ou indirectement ; ce bail est passé aux conditions susdites, en considération de ce que lad. dame bailleresse (marge baille sa) marchandise aud. Guymier au prix qu’elle lui coûte, de celle qui est à présent, «sans luy en faire aucun prouffict et dont sera faict inventaire par le menu» et led. Guymier sera tenu en passer obligation et de payer le prix de lad. marchandise aux termes convenus entre eux et cela avant le premier janvier prochain.
En bas de la page, renvoi à la suite de la clausule Obligeant de cet acte : et si led. Guymier laisse lad. maison au cours des 4 ans et 9 mois du bail, il accepte de payer un complément de 3 sols par livre pour ladite marchandise.
[Au-dessous de l’acte : Reçu V s. t.]

*suppendue : i.e. suspendue ; selon Littré, la prononciation «supendu» serait attestée par quelques exemples aux XVe et XVIe siècles : «Au moins estoit ce tenir les gens en crainte et par especial ses officiers, dont aucuns avoit supendus pour pillerie» (Commynes, Mémoires VIII, 18) ; «Ma maistresse avoit un coche de clisse, qui n’estoit guere supendu que de cordes» (Agrippa d’Aubigné, Aventures du baron de Fœneste III, 2) ; les éditions récentes de ces textes ne confirment pas toutefois ces graphies.
Bien que la forme «suppendue» n’y figure pas, c’est dans l’article souspendue qu’on trouve dans Godefroy les exemples permettant de comprendre de quel objet il s’agit ici :
souspendue : soubspendue, soubzpendue, soubpendue, soupendue, souppendue, soppendue, substantif féminin :
— soupente, saillie.
«Pour avoir fait en une salle une soubzpendue, querir pour ce faire plusieurs potences de boys, pour mectre les bons harnois, comme selles, colliers et brides… 4 livres parisis.» (1401, Comptes de l’Hôtel des rois de France, p. 167, éd. Douët d’Arcq.)
Souppendue (Ibidem.)
« D’une autre chambre faite en maniere de soppendue, estant en la halle ou vendent les tanneurs d’Orléans, en laquelle les beguines souloient demeurer.» (1439, Comptes du domaine du duché d’Orléans, Le Clerc de Douy, t. II, f. 260v°, Archives départementales du Loiret.)
«Que nul ne face souspendues a penneaulx, ou il y ait point d’auber en lieu ou il puisse porter prejudice.» (1467, Ord. XVI, 611.)
«Chambre faicte en maniere de soubspendue.» (1468, Comptes du domaine du duché d’Orléans, Le Clerc de Douy, t. II, f. 261r°, Archives départementales du Loiret.)
«Projecta. Souspendues de maisons, saillies, projects.» (Henri Estienne, Dictionariolum, 1538.) «Soubpendues, ou souspendues de maisons. Projectare.» (Henri Estienne, Petit Dictionnaire français-latin, 1542.)
«Projectz, ou saillies de maisons, souspendues, ou souspentes.» (Nicot, Trésor, 1606.)
«soupendue, ou souspente.» (Nicot, Trésor, 1606.)
— état d’une chose suspendue :
«Sa charogne (de Machomet) fut enclose dedans un coffre de fer qui pend en l’air ou temple de la cité de Mecha par la vertu de certaines lybes de pierre d’aymant qui sont entees et assises au hault mur de une voulte qui est en icelluy temple. Et jaçoit ce que aulcuns folz et simples cuident et aient cuydé que en icelle chose soit miracle et ouvrage divin, toutefois la verité est aultre, car la souspendue du coffre qui contient sa mauldite et puante charongne advint por la vertu et puissance naturelle de l’aymant qui a soy tire et happe le fer.» (Boccace, Nobles malheureux IX, 1, f. 216v°, éd. de 1515.)

Guillaume Roland (Rolant, Raoulland), libraire et papetier, actif de 1516 à 1546, décédé avant janvier 1549 ; il est nommé papetier-juré par arrêt du Parlement le 23 décembre 1524.

«Apud Gulielmum Rolant, in vico Longobardorum», rue des Lombards à l’enseigne du Dauphin.
Il possédait, outre sa maison de la rue des Lombards, celle de La Couronne, rue Saint-Jacques, achetée le 17 décembre 1520, de diverses personnes, parmi lesquelles François-II Regnault ; auquel il vendit le 17 juillet 1522 celle qui portait alors comme enseigne Le Barillet et ensuite celle de L’Éléphant; les maisons portant pour enseignes Le Heaume, L’Ange dans cette même rue Saint-Jacques ; La Corne-de-Daim rue des Murs, achetée de Regnault-Ier Chaudière le 7 juillet 1531, ainsi que des maisons et des terres à Saint-Germain-des-Prés , Haute-Roule, Neuilly, Gonesse , Ouzouer-la-Ferrière etc.
Il eut deux épouses Marie Eschart et Marie Pain (dans le présent document, on lit clairement Paon) et trois filles : Geneviève, mariée à Philippe Brunel, procureur au Châtelet), Anne, mariée à Guillaume Rozer (ou Rosier), avocat au Parlement et Marthe.
Sources : Archives nationales :
X1a 1527 (f. 53v°) [Parlement de Paris, Registres du Parlement civil : registres du Conseil]
X1a 1563 (f. 5v°) [Parlement de Paris, Registres du Parlement civil : registres du Conseil]
Y 94, f. 5v° [Châtelet : Registres d’insinuation : Insinuation des donations suivant l’Ordonnance de 1539 (1539-1553)]
Y 3445, f. 130v° [Châtelet, Registres des saisies réelles, oppositions, adjudications, radiations]
Y 3446, f. 108v° [Châtelet, Registres des saisies réelles, oppositions, adjudications, radiations]
Y 3476, f. 263 et 264 [Châtelet, Registres des saisies réelles, oppositions, adjudications, radiations].
Références : Ministère de l’Éducation nationale – Direction des Archives de France. Guide des recherches dans les fonds judiciaires de l’Ancien Régime par Michel Antoine, Henri-François Buffet, Suzanne Clémencet, Ferréol de Ferry, Monique Langlois, Yvonne Lanhers, Jean-Paul Laurent, Jacques Meurgey de Tupigny. Introduction par Charles Braibant, Paris : Imprimerie nationale, 1958.
Ministère de l’Éducation nationale – Direction des Archives de France. Guide des recherches dans les fonds d’enregistrement sous l’Ancien Régime par Gabrielle Vilar-Berrogain, avec la collaboration de MM. les Directeurs des Services d’Archives des départements. Paris : Imprimerie nationale, 1958.





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